Défi 4000 de la mer à la montagne , Récit d’aventure

Ou comment partir de la mer pour défier l’altitude

Le projet est né en 2016 à l’initiative de Caroline Roussel, professeur d’EPS au lycée Lyautey de Casablanca, aidée par plusieurs autres enseignants. L’idée était de faire découvrir les montagnes marocaines aux élèves du lycée qui ne les connaissaient peu, voir par du tout, tout en partageant leur passion et leurs connaissances de la montagne. Ce petit groupe d’enseignants était composé au début de deux professeurs d’EPS et deux professeurs de Physique-Chimie. Le projet fut appelé le défi 4000.

Etre à la hauteur

Les lycéens choisis devaient être en classe de seconde ou première pour éviter les contraintes du Baccalauréat. Lors du lancement, le projet a connu beaucoup de succès auprès des élèves, il a fallu donc réaliser une sélection. Celle-ci s’est opérée dans un premier temps à partir d’épreuves physiques car, bien évidemment, ce défi 4000 requière des qualités physiques, puis par des jeux de coopération pour déterminer ceux qui s’intégraient aisément dans un groupe et avaient l’esprit d’équipe, et enfin par un entretien pour connaitre les motivations des postulants tout en tenant compte des résultats scolaires pour ne pas impacter les études.

A la fin des sélections 20 élèves ont été retenus. Au programme pour l’année qui allait suivre : randonnées, alpinisme, trail, et Bivouac. Tout au long de l’année, les élèves sont allés à la rencontre des habitants vivant en montagne et se sont imprégnés de la culture berbère. Ils ont terminé cette année par une semaine de randonnée en Bivouac avec pour objectif l’ascension du mont M’GOUN culminant à 4068 mètres.

Les élèves devaient trouver eux-mêmes le financement pour leurs activités, en cherchant des sponsors pour alléger le coût du projet, ou pour participer à l’achat du matériel nécessaire.

Le bilan de la première année fut un succès, un groupe motivé, dynamique, avec une belle cohésion.

Savoir évoluer


Face à ce succès, une 2ème édition est lancée l’année suivante, avec un changement dans l’équipe encadrante, et davantage d’élèves inscrits. Mais la dynamique des élèves change, beaucoup font l’activité pour ajouter une « plus-value » sur leur cv afin d’intégrer les grandes écoles et non plus pour l’activité en elle-même.
L’année s’est tout de même déroulé sans problème.

Pour la 3ème édition, les enseignants souhaitent changer le défi et s’orientent cette fois-ci vers un autre objectif : le mont Kenya culminant à 5199 mètres.
Pour ce projet, ils se sont associés au lycée Français de Madagascar afin de réaliser ensemble l’ascension finale et ainsi pouvoir se rencontrer et partager leurs expériences.

Pour la 4ème édition, le projet évolue à nouveau, il se nomme le Décathlas. Le principe, un décathlon orienté sports de montagne : randonnée, vtt, canyon, course d’orientation, alpinisme, kayak, etc.

L’édition suivante devait se faire en partenariat avec l’association BAYTI qui s’occupe des enfants maltraités qui vivent dans la rue en leur apportant notamment une aide scolaire. Le but était de sensibiliser les lycéens à ce problème au travers de cette association, et permettre à 10 jeunes de l’association de découvrir le sport en montagne. Puis d’organiser une rencontre sportive où les bénéfices serait donnés à l’association. Malheureusement, l’apparition du Covid a entraîné la fermeture des lycées, l’interdiction de toutes manifestations sportives et de déplacements entre les différentes provinces du Maroc, et donc l’abandon de ce projet.

Savoir s’adapter

Cette année est donc la 5ème édition.

Il y a eu beaucoup d’hésitation à reprendre en raison de la situation sanitaire encore incertaine et le risque d’éventuelles mesures radicales prises par le gouvernement marocain, notamment  les contraintes de déplacement. Il a donc été décidé de revenir à l’origine du projet, de reprendre les modalités de la première édition en y associant une prise de conscience de l’impact écologique des déplacements,  le séjour prévu avec les locaux pour favoriser la découverte de leur culture et leur façon de vivre a été rallongé.

Le stage a suscité des intérêts distincts selon les élèves :

-- Le professeur d’EPS qui en a parlé et le flyer étaient plus parlant sur les activités. J’y suis allé sans trop savoir pourquoi, mais après les épreuves de sélection j’étais super motivé.

-- Mon père est un des professeurs membres du projet. Lorsque nous avons appris les détails du projet, mes amis et moi avions envie d’y participer. Nous aimons tous la montagne et les activités proposées étaient vraiment top.

-- Je viens d’une famille de sportifs. Après la réunion d’information, j’ai vraiment eu envie de participer à ce projet : la montagne, les activités programmées mais également le fait de participer à un projet sans les parents, juste avec les enseignants et les autres élèves.

Pour le test physique, les épreuves de sélection étaient dures, nous commencions par une course, puis un jeu en équipe, et nous avons fini par un cross training jusqu’à épuisement (gainage, purpees, pompes, etc.) Ensuite nous avons eu un entretien pour déterminer notre niveau de motivation, et nos sports pratiqués.

Tout au long de l’année, nous avions tous les jeudis 1h d’entrainement avec les professeurs qui avaient un lien avec le séjour prévu.

Détaillons un peu l’année.  Un premier séjour a été effectué à Terre d’Amanar. Au programme, courses d’orientation pour se familiariser avec l’utilisation d’une carte et d’une boussole, de l’accrobranche, une randonnée de nuit, et une découverte géologique et florale.

Pour préparer le premier stage, nous avons appris à nous repérer à la boussole, nous repérer sur une carte. Nous avons mis cela en pratique lors de courses d’orientation. Nous avons aussi continué à entrainer notre cardio et pratiquer l’escalade.


Stage 1 : Direction Terre d’Amanar.

Nous sommes arrivés en train à Marrakech. Dans la journée nous sommes allés grimper sur le mur intérieur du Lycée Victor Hugo. Nous avons rencontré les autres lycéens. Le soir, nous étions dans les familles d’accueil.

Le lendemain, départ pour Terre d’Amanar. Nous avions une course d’orientation par équipe d’environ 10 kilomètres. Nous étions 5 élèves par groupe avec une carte, et lors des différentes étapes nous avions des épreuves physiques, comme dans Koh lanta.

Être bien placé dans le classement donnait de l’avance pour résoudre la Charade Finale qui était une chasse au trésor avec, pour récompense, un paquet de bonbons.

Nous avons fini avec une balade nocturne à la frontale et, à la fin, en récompense, un beau feu de camps en extérieur. Le jour suivant, réveil très matinal avec une session Yoga réalisée par Mme Roussel que l’on a sanctionné en la mettant dans la piscine avec l’aide des autres enseignants. Puis parcours accrobranche avant de retourner se détendre dans la piscine. C’était le stage grand luxe ….


Stage 2 : Direction Tidili.

Nous avons participé à un Trail organisé par le lycée Victor Hugo, lycée Français de Marrakech, spécialité EPS. Il y avait deux parcours en montagne proposés ; un de 10 kilomètres et un de 14 kilomètres.

Avant le 2ème stage nous avons effectué 6 séances de préparation. Au programme, course, prise de VMA avec un Luc léger, et ultimate.

Lors du Séjour nous avons réalisé un Trail sur une journée, c’était très dur mais l’endroit était beau et plaisant. Nous avons fini vidés mais satisfaits de l’avoir fait. La course commençait dans une pente assez raide, c’était vraiment trop dur, mais lorsque l’on trouvait un camarade qui courait à la même allure, on s’auto-encourageait.
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Stage 3 : Direction le Toubkal, sommet culminant à 4167m.


Février, conditions hivernales, froid  mais ensoleillé, crampons et piolet de rigueur. Ascension réussie pour tous les élèves.

Pour préparer le 3ème stage, l’entrainement était court avant le Toubkal. Nous avons fait de la préparation physique et, la dernière session avant le départ, une inspection des sacs et matériels. Le Toubkal s’est fait en 3 jours. Nous avons mis le réveil à 5h pour un départ à 6h d’Imlil avec tout notre matériel et affaires personnelles en plus des crampons et piolet qui nous avaient été rajoutés.

Nous voilà partis pour 7h de rando. Le plus dur, c’était le portage. Nous avons eu une arrivée compliquée au refuge à 3000m, car nous avons eu besoin de plusieurs pauses pour nous alimenter. Nous avons eu des pertes de réflexe avec l’altitude, le sommeil qui arrivait pendant la montée, et surtout le froid qui entrainait des pertes de sensations. Il y a eu aussi quelques larmes qui ont été versées à cause de  la dureté de l’altitude, du froid, du manque d’oxygène. Ce jour-là, le couvre-feu a été bien respecté.

Le lendemain, départ tôt pour faire le sommet, une montée plus lente, heureusement avec les sacs vides. Le vent était glacé, de la buée s’était formée dans les lunettes, le buff autour du cou. Le sommeil qui arrivait à nouveau, il fallait lutter contre.

Les professeurs étaient trop forts, ils aidaient pour le portage, encourageaient, et une belle solidarité s’était installée entre nous. Il y avait tellement de vent au sommet que nous sommes restés juste pour les photos mais le temps était magnifique. La redescente était plus tranquille, et nous avons eu un repas agréable au refuge en milieu d’après-midi, au chaud. Là nous avons fait une belle bataille de boules de neige. Puis repos au refuge.

Le dernier jour, nous sommes redescendus tôt avec les crampons et piolet. Il y avait du verglas ce qui demandait beaucoup d’attention. La descente était tout de même beaucoup plus agréable, moins dure, et nous avons eu plus de temps pour manger et profiter.


Stage 4 : Direction la vallée de l’Ourika


Au programme du weekend, plusieurs activités.
Tout d’abord une randonnée pour monter au plateau du Yagourt avec une nuit en tente. Ensuite des groupes ont été formés pour les différentes activités, une activité par demi-journée : canyon, rencontre avec les villageois pour comprendre le système d’irrigation, la préparation du pain artisanal et évidemment la mise en pratique, rencontre sportive avec les enfants du village.

Entre les stages 3 et 4 : le retour a été compliqué, il y a eu beaucoup de contrecoup, quelques malades, beaucoup de fatigue. Le fait de retourner à la civilisation paraissait fade, comme si les personnes ne vivaient rien, n’avaient rien vécu. On n’avait pas envie d’être là. Mais c’était un luxe d’avoir de l’eau chaude, des sièges confortables, une bonne température ambiante.

La reprise de l’entrainement fût tranquille. On en a profité pour débriefer, regarder les photos, les vidéos prises durant l’ascension. Et après les vacances, reprise du cardio  avec courses et ultimate, ainsi que le check up pour préparer le stage 4 et l’apprentissage de l’utilisation du 8 pour préparer le rappel.

Pour ce quatrième séjour, réveil à 6h pour prendre le train. A cause d’une erreur de l’ONCF (la SNCF locale), les billets de train avaient été vendus en doublon et les places étaient déjà prises. Nous nous sommes retrouvés à 25 personnes dans le couloir, dodo pour certains, devoirs pour d’autres, le voyage a été difficile. Arrivés à Marrakech, nous sommes partis en minibus puis en 4x4 en direction de la vallée de l’Ourika pour rejoindre le Gite où Rachid, le propriétaire, nous a accueilli. Nous avons visionné des documentaires sur le développement des villages environnants. Nous avons eu comme une perte de repère de temps, comme si nous avions été coupés du monde, à ce moment-là.

Le lendemain, après le petit déjeuner, nous sommes montés au plateau du Yagourt, il y avait de beaux paysages avec des mélanges de couleurs. Nous avons campé dans une bergerie. Un peu surréaliste, nous y avons découvert des gravures. Le soir, histoires des villages environnants autour d’un feu de camp puis partie de cache-cache à la frontale. Enfin observation du magnifique ciel étoilé. C’était un moment magique, tous ensemble dans ce lieu.

Au matin, découverte d’un super décor, et d’un super bon petit déjeuner avec les berbères, très accueillants. Puis marche pour redescendre au gite, avec des paysages très variés.



Pour leur dernier séjour, ils ont prévu l’ascension du M’GOUN en itinérance, en bivouaquant au fur et à mesure de leur progression.