L’objectif de la journée est d’équiper un canyon sec (5 rappels) après avoir rejoint le sommet de La paroi du levant et de proposer ainsi une alternative au long sentier qui contourne les gorges du Todra pour redescendre au pied de celles-ci.
Savoir renoncer (16/10/2023, J1)
Nous sommes deux cordées ; la première, composée de Fred C. et Alex qui part dans ‘’Hanna chez les grands’’ (9 longueurs, 5c+ max) avec le matériel (perfo, goujons, plaquettes, maillons rapides…), et la seconde composée de Théo et moi-même (Fred B.), qui partons dans ‘’Shark’’ (6 longueurs, 7a+ max). Arrivés au pied de la voie, nous remarquons que le premier point se trouve à environ 12 mètres, le deuxième 6 ou 7 mètres au-dessus alors que l’équipement est annoncé ‘’bon’’ avec 12 dégaines. Nous appelons Kat, en repos aujourd’hui, pour qu’elle nous apporte des câblés et des Friends. Une fois le matériel récupéré, Théo s’élance dans la première longueur qui serpente légèrement le long d’une ligne de faiblesse dans une magnifique dalle en 7a+. Il pose des coinceurs pour compléter les quelques plaquettes et pitons présents sur la voie jusqu’à R1. La corde reliant les trois points du relais (deux plaquettes sur de vieux goujons de spéléo et un piton) est vieille et raide, ne présageant pas de sa solidité.
Si la deuxième longueur qui rejoint un dièdre comporte quelques plaquettes de 6 et deux ou trois pitons, il n’y a plus rien dans L3. De plus, les nombreux blocs instables rendent difficile la progression et la protection. La suite dans le dièdre s’annonce trop dangereuse, autant pour celui qui lead que celui qui assure. Un bloc s’est ainsi décroché alors que Théo a à peine posé les doigts dessus. Alors, après 25 mètres de grimpe, il abandonne le dièdre et rejoint une vire sur la gauche pour construire un relais sur une arête et redescendre en rappel à R2, puis l’un après l’autre jusqu’au sol. Il laisse dans L3 un SAR, deux câblés et deux Friends que nous reviendrons chercher plus tard en équipant cette grande voie depuis le haut. Fred C. et Alex équiperont donc seul le canyon sec.
La taille a son importance (18/10/2023, J2)
Deux jours plus tard, nous faisons appel à un muletier pour monter le matériel au sommet de la voie car le tout pèse près de 70kg (80 goujons et plaquettes, une corde statique de 100m, une corde à double de 60m, deux perforateurs, 5 batteries, deux marteaux…). Le rendez-vous est donné pour 9h à l’entrée des gorges. Le jour J, nous nous retrouvons face à un petit âne à peine plus gros que le sac de portage… Jamais il n’atteindra le sommet. Nous préférons reporter et trouver une mule à même de supporter la charge. Mohammed, vendeur de Chèche et de Kilim à l’entrée des gorges à qui nous racontons notre infortune, interpelle alors un nomade muletier passant par là. Après avoir négocié le prix, le rendez-vous est pris pour dans trois jours à 7h30.
Pas plus de temps que nécessaire (21/10/23, J3)
Lorsque nous arrivons, le nomade nous attend déjà. Le matériel est ficelé sur la mule en à peine 10 min. Après 1h45 de marche, nous atteignons le sommet de la paroi du levant. Deux Pulses plus tard, l’emplacement du relais est déterminé. Je descends en premier pour purger la voie et installer le relais suivant pendant que Théo équipe la longueur. Pendant ce temps Kat surveille, hors de portée des éboulis, que personne ne se trouve dans le secteur. Il est 18h30 lorsque Théo touche le sol sans plus un point dans son sac, mission accomplie. En dehors de la corde à double qui s’est coincée dès le départ, d’une panne de batterie au milieu de la 5ème longueur nous obligeant à laisser un petit paquet de points à R4 que nous poserons le lendemain en enchaînant la voie, d’une traversée dans des épineux qui nous a zébrée les mollets, d’une remontée sur corde due à une erreur dans le dièdre, de nuages de poussière et de terre en déblayant la 4ème et la 3ème longueurs, et d’un marteau qui se décroche du mousqueton au dernier relais (R1) m’obligeant à enfoncer le dernier point à la barre à mine, tout s’est bien passé !
Reste à l’enchainer (22/10/23, J4)
11H30, départ dans la voie afin de laisser passer le soleil derrière la crête et grimper rapidement à l’ombre, Théo en tête, Kat et moi en second avec le matériel (perfo, clé, marteau…). Les longueurs s’enchainent et nous sommes enthousiastes car la grimpe est belle, très verticale, de beaux mouvements. Arrivé à R4, Théo récupère les points laissés la veille, le matériel que nous avons dans nos sacs à dos, ainsi que quelques coinceurs pour se protéger. En à peine une heure il équipe la longueur et rejoint R5. C’est avec le bout des doigts sensibles, la dernière longueur offrant des prises particulièrement acérées, et le sourire aux lèvres que nous terminons la voie, sachant que d’autres grimpeurs prendront autant de plaisir que nous à l’enchaîner.
ED- 7a+>6c | X1 P1 E2, 250m
- L1 : 7a/+ 32m
- L2 : 7a 31m
- L3 : 6b+ 41m
- L4 : 6a/+ 49m
- L5 : 6a 47m
- L6 : 6c/+ 50m
De L1 à L2, rééquipement Théo et Fred Brigaud
De L3 à L6, équipement. Théo et Fred Brigaud
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